17 octobre 2023.
Début des cours au sol pour apprendre le vol aux instruments multi-moteurs sur Beech 58 (surnommé Baron). Comme il y a peu de différence par rapport au TB-20 sur l’aspect IFR (le vol aux instruments), l’accent est surtout porté sur la gestion du vol en « N-1 », c’est-à-dire dans le cas où l’un des deux moteurs tomberait en panne. C’est une situation particulière où l’avion vole de façon dissymétrique avec un fort impact opérationnel. Il y a donc des procédures à appliquer pour réagir efficacement à cette situation.
Au cours de la semaine, nous passons notre FCL 055 D (test d’anglais aéronautique sur la phraséologie en IFR).
Nous débutons les premières séances sur simulateur quelques jours plus tard, où nous restituons dans un premier temps ce qu’on appelle les « flow ». Ce sont des séquences d’actions apprises par cœur et qui se terminent la plupart du temps par une check-list, permettant de vérifier que les items les plus importants ont bien été réalisés. Il existe des « flow » pour la plupart des phases de vol : avant et après la mise en route des moteurs, avant le décollage, pendant la descente, etc.
Nous profitons également des séances de simulateurs pour s’entrainer au vol en N-1, dans le cadre d’une panne ou d’un feu moteur virtuel.
Toujours en trinôme avec Olivier et Audorisca, nous passons du simulateur à la réalité et démarrons les vols sur Baron.
Le premier vol était à couper le souffle ! Avec deux moteurs Continental de 300ch chacun, la poussée au décollage est incomparable avec celle du TB-20. Nous sommes littéralement collés à notre siège pendant l’accélération.
La masse de l’avion se fait également sentir, notamment lors de l’arrondi à l’atterrissage.
Quelques vols plus tard, une séance est dédiée à la coupure réelle d’un moteur, afin de ressentir les « vrais » effets aérodynamiques sur l’avion. Un moment assez impressionnant !
Nous alternons les séances avec deux instructeurs différents et le temps défile : mon test IR-ME (Instrument Rating Multi Engine) est confirmé pour le 14 décembre.
Afin de gagner en expérience, nous préparons des navigations aux quatre coins de la France grâce aux performances du Baron : Avignon, Toulouse, Bordeaux, Tarbes, la Rochelle, Biscarosse, le Touquet,… Nous avons également la chance d’organiser un découcher dans le sud-ouest pendant cette période, malgré une météo très pluvieuse… !
Le jour J du test, le départ est prévu dans la matinée, avec un risque de givrage. Le programme : un aller-retour à Dole depuis Saint-Yan, avec une simulation de panne moteur au décollage, une approche aux instruments conventionnelle, de la maniabilité en panneau partiel, une remise de gaz N-1, un tour de piste.
L’examen s’est globalement bien passé, malgré quelques erreurs que j’aurais pu éviter. Je suis soulagé.
Cela marque la fin d’une période incroyable passée à Saint Yan pendant neuf mois.
Nous sommes conscients de la chance que nous avons eue de pouvoir rester tous ensemble pendant la phase pratique, là où, habituellement, la plupart des promotions sont découpées en deux ou trois groupes et réparties sur différents centres de formation (Grenoble, Carcassonne, Montpellier).
C’est donc avec une forte émotion que je quitte définitivement Saint Yan le 15 décembre 2023, afin de commencer la phase de transformation réacteur et de formation en équipage, appelée Jet Orientation Course & Multi Crew Coordination (JOC-MCC) le lundi suivant, le 18 décembre.
Cette étape, destinée à nous former sur des jets multi-pilotes, se déroule comme suit : une partie théorique à Toulouse, puis 40h de simulateur A320 full flight (FFS) à SimAéro, près de l’aéroport Charles de Gaulle. Le simulateur full flight est mobile et reproduit les sensations d’accélération et de rotation.
Dans un premier temps, nous retournons donc sur le campus de l’ENAC Toulouse pour une semaine de théorie. Nous sommes sensibilisés aux facteurs humains dans les cockpits au travers d’études d’incidents et d’accidents, et apprenons la répartition des rôles et des actions pour un équipage à deux pilotes, aussi bien dans les phases de vol normales que pendant le traitement d’une panne.
On peut comparer cela à un « orchestre », où chacun des deux pilotes sait exactement ce qu’il doit faire à tout instant du vol.
C’est un nouveau concept, puisque notre formation ne s’est déroulée pour le moment que sur des avions mono-pilotes (TB-10, TB-20, Beech 58)
En parallèle de ces cours, nous apprenons les systèmes et l’interface de l’A320 puisque c’est dans un simulateur Airbus que nous devrons restituer ces nouvelles compétences pilotes.
Après les fêtes de Noël, nous sommes donc accueillis chez SimAéro par le responsable de la formation avancée de l’ENAC.
Chaque journée est composée d’1h30 de briefing, de 4h de simulateur avec une pause de 10min au bout de 2h, puis 30min de debriefing. Nous avons en tout dix séances de simulateur. Nous commençons la plupart du temps tôt le matin, vers 6h30.
Je suis en binôme avec Nicolas pour l’ensemble des dix journées.
C’est une expérience incroyable. Un moment que l’on attendait depuis longtemps dans la formation : se retrouver aux commandes d’un avion de ligne, pour l’instant dans un simulateur extrêmement réaliste.
Au-delà de cette satisfaction, il y a beaucoup de travail. Les séances sont intenses. Nous apprenons à gérer l’énergie d’un avion à réaction, à se familiariser avec les commandes de vol électrique (appelés fly-by-wire), et à réagir, en équipage et de façon méthodique, à une panne d’un système ou une panne d’un moteur.
Lors de la dixième séance, un Progress Check (PC) valide l’acquisition de ces nouvelles compétences.
C’est déjà la fin de ce stage au rythme soutenu mais infiniment enrichissant, qui nous laisse entrevoir concrètement et pour la première fois le métier de pilote de ligne.
Cela marque également la fin de l’aventure à l’ENAC. Je n’oublierai jamais tous ces moments uniques passés à Toulouse et à Saint Yan…
La prochaine étape est désormais l’intégration chez Air France lors du SADE (Stage d’Adaptation à l’Exploitant) le 28 février 2024 et la formation technique pour être qualifié sur Airbus A220 !